L'État fera-t-il un Loto
pour les #GiletsJaunes ?
Il
est problématique pour certains courants politiques de se mobiliser “contre les
taxes” et l’augmentation des carburants. On se demande illico pourquoi le point
de fixation n'a pas pris sur la hausse du gaz (7,45 % au 1er juillet 2018)
ou de l'électricité, les tarifs des autoroutes ou les APL ?
On
pourrait traiter bien sûr plus longuement de ce que draine la question de la
mobilité et la manière dont elle est vécue au quotidien, mais aussi comment
elle s’inscrit depuis un certain temps comme une “liberté ” et même un mode
de vie.
Mais
ce qui nous nous questionne c’est que certaines gouttes de diesel soient à
l'origine du “débordement” de cette cuve sociale car c'est un
certain type de rapport à l’engagement tel qu’il peut être pensé et “organisé”
dans les sphères dites “politiques” ou “militantes”qui est finalement interrogé.
Ainsi
les tentatives de mobilisations sur la Loi Travail, l’attaque sur le
régime des retraites qui s’annonce, ou la privatisation des transports
publics ne semblent pas avoir eu la force symbolique de cette augmentation de
taxe.
Face
à cette “auto-organisation” (pour la spontanéité on ne sait quand elle
commence) médiatisée par les réseaux sociaux et relayée complaisamment par les
médias la première question qui s’impose nécessairement relève de la forme
prise par ce ras-le bol.
On
précise rapidement ici que cette “autonomie” (hors syndicats et partis)
n’est pas plus un principe politique que le dirigisme. Ce qui manifestement déstabilise
les plus fétichistes jusqu’aux léninistes comme les plus
opportunistes-suivistes de l’anti-léninisme. N’oublions jamais que forme et
fond sont liés et que l’oublier c’est faire des acteurs des luttes dans la
plupart des cas des marionnettes. Ce qu’ils ne sont certainement pas.
La
réussite qualitative des gilets jaunes de par les nombreux lieux de rendez-vous
s’inspire quoi qu’on en dise d’un certain type de blocage de flux. Les
blocages des ronds-points, des autoroutes ou des accès aux zones commerciales
font étrangement écho aux places urbaines occupées par les NuitsdeBoutistes
et aux échecs de ces derniers quant à la tentative de paralysie des grandes
gares et même de la fameuse “économie”.
Ce
qui est flagrant, c’est que les gilets jaunes ont bloqué des lieux quotidiens
et de transits qui sont finalement les leurs, ceux qu'ils empruntent tous les
jours et plus précisément là où ils seraient eux-mêmes “emmerdés”.[1]
Déterritorialiser où déplacer les “emmerdes” peut être vu comme une manière d’éviter un certain type de confrontation où ils pourraient être plus concrètement question du “pouvoir d’achat” plutôt que demander la baisse ou le gel des taxes par un appel régulateur à l’État.
C’est
peut-être cela qu’il faudra questionner et analyser. Qui demande ? Et à qui et quoi ? Pourquoi évite-t-on la
lutte directe avec les patrons ? Que nous disent ces luttes sur les moments de
la conflictualité sur le lieu de travail ? Sur ce qui est possible ou plus dans
le cœur historique de la reproduction du capital ?
Augmenter
les salaires ou baisser les taxes ? La problématique n’est bien sûr pas la
même.
Certains
gilets jaunes en se rendant devant l’Élysée pour être “entendus” et “écoutés”
ceci non sans une déconcertante facilité et tout en laissant d'ailleurs
intactes les devantures du spectacle marchand nous incitent à penser qu’ils
seront bientôt considérés comme de potentiels décroissants. Ceci
même si la “lutte” contre les “taxes” devait être "victorieuse" car ce que l’État "donne" d'une main il le reprendra deux fois plus d'une autre avec l'aide des patrons. [2]
Le
choix des terrains et la demande d'audience ou de reconnaissance des
revendications en disent long sur ce qui se déploie, plus précisément sur cet
appel direct à l’État et aux références constantes à la nation par le chant
patriotique que l’on a pu voir entonner jusqu’au leader de la France
Insoumise devant l’assemblée.
On
serait tenté de conclure un peu facilement que le jaune va mal au teint du
mouvement ouvrier et chaque fois qu’il a la jaunisse [3] cela se termine toujours par la “réalisation de la renaissance nationale”
et “par la réconciliation des classes”.
Vosstanie le 19/11/2018
Notes
[1] Qui ne sont pas à proprement parler des lieux de production fixes mais des moments, des flux, sauf pour certaines catégories de la population. Ces lieux sont ils leurs outils de production ?
[2] Qu'il faudra affronter directement.
[2] Qu'il faudra affronter directement.
[3] Christophe Maillard, Un syndicalisme impossible ? L'aventure oubliée des Jaunes, Vendémiaire, 2016
Mise à jour du 26/11/2018
Toutes classes
confondues ?
Un tract de Gilets
Jaunes
Il est difficile d’extrapoler sur le tract que l’on trouvera ci-dessous pour autant il nous paraît assez significatif du mouvement des gilets jaunes. Il a été récolté in situ dans le nord de la France au niveau de la frontière avec la Belgique.La lecture graphique est sans équivoque comme les mots utilisés. La dimension interclassiste et identitaire est manifeste et l’appel au “Peuple de France” dit presque tout sur la teneur du mouvement et de ses attentes.Nous en discuterons dans la prochaine émission de Radio Vosstanie.
On discutera de ce "peuple"
Des "citoyens"
Du "Nos" dirigeants"
De "Toutes classes confondues"
"de l'enrichissement" ...en "toute impunité"