jeudi 31 mai 2012

Psychologisme de masse du capitalisme "financier"

Psychologisme de masse du capitalisme "financier"

En sortant de cette salle de cinéma ou nous sommes allés voir Margin Call, je me suis dit Francois Ruffin (1) peut aller se rhabiller et avaler quelques sabres rouillés...ce qu'il s'acharne à faire comme un sous-rentier de la dénonciation de la "finaaance" et des "200 familles" dans sa version moderne, ( Le Siècle) Hollywood le fait de manière bien plus convaincante et moins caricaturale que lui.

Il est toujours très intéressant d'accéder à la vision mainstream de marge avec grosse distribution d’acteurs, de la dénonciation du capitalisme dans sa version “financiarisée" tendance US. Qui n'est pas si éloignée que cela finalement d'une critique que pourrait bien partager un militant du front de gauche ou le gauchiste moyen du NPA.

Margin Call est un film de tension, peut-être n'est-ce qu'un exercice de style dont l'objet est circonstanciel, à la mode, un peu comme Paul Jaurion ou Frédéric Lordon (tiens ça rime ! avec dindons aussi...).

Si vous allez le voir donc vous ne saurez pas grand chose des CDS (2) et autres subprimes. En revanche, et ceci comme peut le dire le plus cynique de tous, le "big big boss" de la boite d'opérateurs de marché dont il est question, c'est de la merde dont il faut absolument se débarrasser. Des vrais gens la prendront certainement en pleine gueule mais de cela il n'est pas question...

Résumons rapidement le film.


La hiérarchie et ses relais, tout aussi incompétents que sont les managers arrivistes, étaient prévenus depuis quelques temps, qu'ils jouaient avec les limites du « casino ». Ils n'ont pas écouté les mises en garde d'un employé du risque viré dans la énième purge qui dégage les faibles pour renforcer la secte des traders.

Ce plan social et la découverte de positions financières catastrophiques (le big one financier) qui planterait l’entreprise, seront les minutes d'atermoiement qui permettront finalement aux affaires de continuer, grâce ou à cause des ordres du grand patron luciférien. Sauve qui peut avec la maille.

Grattes-ciel sans twin et espaces vitrés froids, ordinateurs et grands écrans constamment allumés sur les indicateurs boursiers, les moments de cette urbanité étendue (en hauteur surtout) et illuminée donnent une atmosphère clinique et polardesque à cette intrigue en milieu hostile et permet rapidement aux lignes de fonds de se dégager. Il ne manque plus que le scalpel pour attaquer cette vue de coupe du système financier ceci au travers hélas ! de la psychologie des personnages...


Les thèses du film comme paradigme d'analyse du système capitaliste...financier.
De la gauche du capital jusqu'à Hollywood.

Ici point de héros en collant, à cape ou à rétro-fusées, d'humanité attaquée par un méchant monstre rouge ou communiste voir terroriste musulman c'est selon.

Mais comme on de déroge pas au dogme, script, ou à la bible d'Hollywood il faut bien un sacrifié, ceci pour conserver cette communauté factice du capital (nations, patries et autres fétiches mortifères) faite essentiellement d'individus "libres" et de monnaie qui circule. Toute l'utopie du « nouveau monde » en somme. Le profil du coupable de cette "enquête" est identifié, sa condamnation probable, sa rédemption peut-être encore une histoire de billets.


Du psychologisme comme méthode.

Si le film est bien léché, son montage est suffisamment sobre et lent pour laisser quelque profondeur aux personnages même si la complexité des êtres face au « métier » et au monde n'est possible que grâce à quelques regards interrogatifs et des introspections froides. La narration pointe petit à petit, dans la chaîne de la responsabilité vers le haut de la pyramide. Cette pyramide des obligations fait des traders des pantins grassement payés dont la seule obsession est de gagner de l'argent, plus que les autres (si possible) et de gravir l'échelle de « peintre » mais aussi, esprit d'entreprise oblige à "faire le job". A ce niveau de rémunération à vrai dire, les choses n'ont plus de sens ou d'importance. Y-a til simplement un juste salaire ? Peu importe ici les mécanismes et la logique du capitalisme son objet sa condition ses conséquences.

Comme on pouvait le prévoir le film s'enfonce dans une explication anthropomorphe du capitalisme. La démonstration, la clé de compréhension du capitalisme n'étant pas donnée pour des raisons que nous comprenons (les limites intrinsèques du genre, d’où l'on parle), les défauts de la machine sont imputées au seul caractère cynique et carnassier du Big boss. Qui seul décide, puisque c'est le boss... Ce dernier est d'ailleurs conforté par l'apathie arrangeante des employés tenus par des indemnités conséquentes.

Le capitalisme trouve donc un visage, celui du patron. Individu forcement le plus cynique des cyniques mais si humain, trop humain.

La Nature humaine « naturalisée »

Si nous ne sommes pas des « sujets automates » (3) il n'est pas question ici de nier ici que certaines personnes sont plus responsables que d'autres. Mais sur-investir tel ou tel individu d'une charge aussi forte ceci en dehors de toute logique, « d'ordre social » complexe en reproduction comme le capitalisme, ne relève que de l’antithèse simpliste ou nous ne serions que du capital variable sur pattes. Ainsi deux thèses antinomiques, qui relèvent d'une même logique traversent le film. Ou bien nous serions face à un procès autonome sans sujet ou s’agencerait des structures, ou nous serions parlés, agis, ou bien nous serions sous le joug d'un tyran, dictateur ou Big boss ou pasteur et là nous serions de sacrés moutons en quête perpétuelle de la meilleure herbe à brouter, ou ce qu’il en reste.

Pas besoin de synthèse de ces deux simplismes mais d'une analyse totale du réel en mouvement:

La personnification permet d'essentialiser cette in-humanité et les incompréhensions propres aux forces sociales sans logique apparente, et ainsi de naturaliser cette "nature" humaine, calculatrice, arriviste, frustrée, suicidaire par moment, peut-être est-ce le parti pris du réalisateur. Cette psychologie empirique idéologisée c’est à dire le psychologisme comme méthode d'analyse du capitalisme débouche ainsi nécessairement sur une l'apologie de la société marchande, mais aussi sur une anthropologie réactionnaire qui n'est pas étrangère d'ailleurs à l'individualisme méthodologique. Elle constitue le sommum de l’analyse “critique” du capitaliste ou de “l’anti-capitalisme” dans sa forme financière. Le capitalisme ne serait pas mauvais, sa logique incroyable et destructrice, elle ne serait imputable qu'aux hommes et à certains individus de type sociopathe. Le parti pris anthropologique fait de la conséquence la cause.

Ou encore : Si le capitalisme est mauvais c'est que les hommes le sont. Et son antithèse objectiviste ou structuraliste : Il s’agit de forces déchaînées par l’auto-activité de la loi de la valeur. Plus d'humain donc que des structures dont la logique propre serait implacable sans retour. Il n'y a plus qu'a fuir, prier ou discourir sur la fin des temps, le métier de prophète un bel avenir.

Le paradoxe qui permet finalement à un idiot utile du capitalisme national ou à un nationaliste de gauche et de droite qui ont pour cible la finance et qui ne comprennent rien au capitalisme et à sa reproduction (qui est la conséquence de cette vision psychologisante) c'est qu'elle débouche sur cette anthropologie dont les seules développements, aboutissements possibles ne peuvent être que conservateurs ou réactionnaires. Il suffira donc de se débarrasser de la finance ou de la taxer, que tel ou tel individu méchant ou trop âpre au gain, soit liquidé, que tel que tel cercle d'influence soit dénoncé. Ceci grâce à l’intervention musclée d’un nouveau caudillo local ou exotique. Hélas pour la gauche du capital ceci jusqu’à son extrême droite, cette finance n'est que la face cachée de l'iceberg capitaliste et de sa dégueulasserie exploiteuse. Peut-être voudront-ils alors demander des comptes aux patrons ?! Comme cela ne marchera pas ils demanderont finalement à fermer les frontières et à produire français.. Et pour terminer avec des “bons blancs bien de chez nous" qui auront au moins du boulot dans "notre espace national". Tout est dénoncé, rien transformé ceci pour conserver l'essentiel
l'exploitation, la soumission, l'aliénation ! (Bien sûr nous n'avons que foutre que ceci soit délimité à notre seul espace de vie fusse t-il aléatoirement national...la belle affaire ! Qui peut le croire dans cet  état de guerre économique planétaire ?)

Réel versus Virtuel ?

Le capitalisme c'est comme la chasse. Il y a les bons chasseurs et les mauvais capitalistes. Le présupposé de l'analyse ce ceux qui ne veulent pas jeter le bébé avec l'eau du bain, c'est que il y a d'un coté la bonne économie la réelle, de l'autre la virtuelle forcement autonome. Ainsi le film nous propose t-il cette distinction éculée au travers de la tirade de la fabrication d'un pont (scandée par l'ancien gestionnaire des risques) et des miles gagnés par les automobilistes américains qui auraient gagnés du temps grâce à son œuvre. Il s'agit bien sûr de ce temps si précieux qui est de l'argent en puissance.(4) Cette question de l'utilité s'inscrit toujours dans le temps de la production capitaliste et de l'augmentation de sa rapidité de circulation. Quant à l'introspection que l'employé du risque a sur le sens de son travail, elle n'est possible que dans les moments de remise en cause personnelle qui ont pour sources le crash boursier final et le licenciement.


La catastrophe « boursière » est telle la porte de sortie du capitalisme ? un moment de sa remise en cause ? (5)

Ce monde des antinomies, c'est à dire des choses contraires et inconciliables et sans liens, permet de justifier d'en éliminer une partie, sans en éliminer l'autre (6). Cette méthode d'analyse du réel pétrifié dont le psychologisme du film constitue la méthode d'approche est propre à la pensée bourgeoise. Il s’agit d’une articulation de processus mentaux liés à une position de classe qui permettent à un monde et à ses représentations de tenir debout, c’est à dire d'être légitimées, conservées et en aucun cas dépassées (ceci parce que le capitalisme est perçu comme naturel et a-historique et nécessaire (7) ).

Elle empêche de comprendre la dialectique de la fameuse économie réelle (dont il faudrait partager “équitablement” les “fruits” d’un arbre pourri ?) et de la virtuelle comme profondément liées et indissociables.

La possible solution humaniste proposée par le scénario de J. C. Chandor, comme une intervention humaine qui briserait le cercle infernal du suivisme et de l'arrivisme s’évapore au fur et à mesure. Il ne reste plus que la panique bancaire et finalement un univers de guerre permanente synthèse plausible et réaliste entre Mad Max et Blade Runner ou la seule compassion envisageable est celle avec les chiens.


L’Idéologie de la corne d'abondance.

Les traders sont des troupes de chocs d'un capitalisme sans chars ni bombes dont les dégâts réels sont virtualisés grâce à la mission supposée qu'ils rendent au “monde libre”. Le film propose donc ouvertement que le "dérèglement" du capitalisme est la perversion d'un supposé marché sain et fluide, et que la rupture du pacte moral et vertueux de la richesse possible, cette "éthique du trader" serait brisée par la personnalité sans "principes" ou perverse d'un big boss. Ceci avec quelques complicités bien sûr ...parce que tous y croient quand même à ce "rêve" de l'accumulation et de la puissance mais elle est aussi et surtout le cauchemar des autres c'est à dire de l'immense majorité.


1 - Journaliste sur France Inter (Las bas si j'y suis) et à Fakir. Apôtre de "la" frontière et du protectionnisme. Qui s'étonne que la CGT s’il vous plaît ! ne prévoit pas de grèves ou d'offensives après les élections présidentielles de mai 2012....Pour entendre ce dernier se prendre une leçon de lutte des classes par le politicien rabateur du PS, Gérard Filoche écoutez donc L’émission Las Bas si j’y suis. Les financiers au coin du bois (II) Le mardi 15 mai 2012 . http://www.la-bas.org/article.php3?id_article=2462

2 - Credit default swap

3 - Contrairement à ce que n’est pas loin de penser un Robert Kurz p137 in vies et mort du capitalisme Editions Lignes 2012.

4 - Voir le moment ou le jeune trader plutôt doué en calcul mathématique vient annoncer à sa hiérarchie qu'il a un doctorat en construction de fusées....exemple typique selon le réalisateur de l'économie réel...les fusées !


5- Conseil de lecture : Comme la grenouille sur son nénuphar Tom Robbins http://www.gallmeister.fr/livre?livre_id=483
comme ça en passant.


6 - “Mon véritable adversaire, il n'a pas de nom, pas de visage, pas de parti, il ne présentera jamais sa candidature, il ne sera jamais élu et pourtant il gouverne. Cet adversaire, c'est le monde de la finance" le 22 /01/2012 - François Hollande.


7 - Nécessaire à la domination de classe. La totalité capitaliste organise la reproduction des infra-structures et super-structures de légitimation. (idéologies, rapport de force, juridisme, armées, mise en condition, exploitation etc...)

jeudi 17 mai 2012

DEMOCRACIA TOTALITÁRIA por João Bernardo

DEMOCRACIA TOTALITÁRIA

Teoria e Prática da Empresa Soberana
por

João Bernardo


PORQUÊ ESTE LIVRO?

Não era minha intenção voltar ao assunto, depois de já ter escrito tantas páginas sobre a soberania das empresas que em diversos livros e artigos eu denominei Estado Amplo, em oposição ao Estado Restrito, que seria o aparelho de Estado clássico. Outro tema me tem ocupado agora, muito distante deste, e nem me agrada retomar uma questão quando ela me parece suficientemente analisada nem gosto de deixar um trabalho em suspenso para me lançar noutro. Mas é sabido que a história nada respeita, muito menos as preferências individuais, e o que sucedeu nos últimos tempos, desde os atentados de 11 de Setembro de 2001 em Nova Iorque e em Washington até à conquista do Iraque pelas tropas norte-americanas e britânicas, obriga a uma profunda reflexão. [suite]

vosstanie.org

dimanche 13 mai 2012

La lettre ouverte de Gorter: Tenants et aboutissants

Le texte de Serge Bricianer que nous proposons à la lecture ceci au format de fichier PDF est extrait de la brochure d'Herman Gorter et de sa lettre ouverte au  camarade Lénine (brochure éditée chez Spartacus et disponible - B 109). Ce texte introductif  au volume à le mérite de re-contextualiser le texte de Gorter mais pas seulement puisque il analyse les positions et les perspectives après l'échec de l'action de Mars, ainsi que les retombées.

Ainsi Serge Bricianer pouvait-il conclure:

" Certes, il serait aberrant de vouloir restaurer la tradition du communisme de conseils, morte avec la période qui l'a engendrée. Mais aussi quelques-unes des notions élaborées par ce mouvement conservent en dépit de tout un pouvoir d'éclairement d'autant plus précieux que la possibilité de revoir un affrontement massif du nouveau et de l'ancien n'est nullement exclue dans la période historique qui s'ouvre de nos jours. En ce sens, et même si les moyens de diffuser ces notions restent dérisoires, la lettre ouverte de Gorter, ses tenants et ses aboutissants, permettent de jeter un regard autre sur les modalités concevables de luttes ouvrières qui quitteraient enfin le terrain de la défensive, inhérent aux conditions du Capital, pour occuper celui de l'offensive." 



vendredi 4 mai 2012

jeudi 3 mai 2012

LA TYRANNIE SPORTIVE par Jean-Marie BROHM

Avant que l'idéologie sportive* ne se déverse par tonnes, ceci sans interruptions, nous invitons les lecteurs à se munir au moins d'un titre de  Jean-Marie BROHM


THEORIE CRITIQUE D'UN OPIUM DU PEUPLE

La sportivisation généralisée de l’espace public au sein de la mondialisation capitaliste est l’une des expressions les plus achevées de la chloroformisation des consciences. L’omniprésence publicitaire du spectacle sportif, la prolifération des violences, corruptions, dopages et manipulations biologiques, l’instrumentalisation politiquement correcte de la fausse conscience sportive (« sport-culture », « sport-intégration », «sport-émancipation ») représentent la substance même du sport-opium du peuple, une propagande de masse véhiculée par tous les canaux de l’industrie de l’amusement.

La tyrannie sportive que les divers despotismes, États totalitaires et régimes policiers ont toujours choyée comme une structure de contrôle politique s’est aujourd’hui affirmée dans l’interminable série des circenses où se renforcent le populisme, l’aliénation culturelle et la servitude volontaire. Les clameurs du stade, les « ferveurs », les « passions » et les « vibrations » sportives célébrées avec tant de complaisance par les idéologues postmodernes, loin d’être une manifestation de la « démocratie égalitaire », débouchent sur une nouvelle forme d’intégrisme : l’intégrisme des foules vociférantes, du culte de la performance, de l’abrutissement populaire par « la monstrueuse mécanique du divertissement » (Theodor W. Adorno, Minima Moralia. Réflexions sur la vie mutilée, Paris, Payot, 2001). Editions Beauchesne 2006.

Voir aussi le Les Meutes sportives : Critique de la domination ed. L'Harmattan peut-être plus complet mais plus volumineux et plus cher.

* Coupe d'Europe de footbabal, course de vélo, et jeux olympiques à Londres.