vendredi 10 mai 2019

Sur le “médiateur des échanges organiques”

Sur le médiateur des échanges organiques


Dans le règne de la division du travail et de l'appropriation individuelle des moyens collectifs de production c’est-à-dire de l’aliénation et de l’exploitation, le slogan qui invite purement et simplement à l’abolition du travail peut paraitre aussi charitable que maladroit ou même tronqué surtout pour un lecteur de Marx.

La tâche n’a pas été facilitée on doit le concéder dans l’analyse “marxienne” pour ceux qui ont continué à identifier à tort et de bonne foi, l’objectivation et la réification chez Marx.
 « Le produit du travail est le travail qui s’est fixé dans un objet, qui s’est chosifié, il est l’objectivation du travail [; ] la réalisation du travail est son objectivation » [1]
Si Marx demeure le critique de l’exploitation, de l’humain comme capital variable, il indique également en creux dans le Capital ce qu’il en serait dans la société communiste.
Ainsi Marx fait du travail une nécessité éternelle [2] qui existe indépendamment de toute forme de société. On comprendra donc ici que même dans une société débarrassée de l’argent et l’État ou de l'exploitation, il demeurera comme son objectivation. (Voir plus haut)

Car pour Marx le travail qu’il nomme le médiateur des échanges organiques ou de la circulation matérielle est pour lui la condition indispensable de l’existence de l’Homme.

Reste à savoir ce que nous arriverons collectivement à définir comme utile ou valeur d’usage, comme subsistera également dans cette hypothétique société la question de la "production" de superflu. Autrement dit des “choses” ou des connaissances qui ne servent à rien. À moins que la dichotomie entre utile/inutile ne s'effondre….dans ce nouveau monde de créateurs.

Ce travail dont nous ne connaissons rien (sauf qu’il est éternel), ne peut pas être hic et nunc, l'activité (ou même l’idéologie de l’artisanat ou encore le retour fantasmatique à la petite paysannerie à la mode sous nos latitudes) ceci contre le "travail" aliéné/séparé, salarié, même si elle est pensée comme anti-travail ou s'imagine en opposition (surtout refuge) au travail marchandisé ou inutile car finalement tout cela l’est avec les catégories d’un monde exploité mais surtout qui n’est pas extérieur à certaines déterminations du capitalisme sauf à vivre dans une grotte de manière autosuffisante.

Le cœur de l’œuvre de Marx se trouve à notre avis dans sa critique de l’aliénation (Économique, politique et religieuse) il doit nous permettre de redéfinir ce qu’est une médiation [3] non comprise comme séparation mais comme coopération ou association non obligatoire. Mais le tour de force semble bien difficile dans une époque ou le capital et ses agents convoquent et hystérisent toutes les subjectivités pour le profit.

NOTES 
1. Manuscrits de 1844 dans la traduction de Franck Fischbach, Vrin 2007.
2. Le Capital - Livre premier : https://www.marxists.org/francais/marx/works/1867/Capital-I/kmcapI-I-2.htm
3. Même technique.