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samedi 1 août 2020

Vieilles lectures pour cet été (I) : Le point de vue d'Henri Lefebvre sur les situationnistes

Vieilles lectures pour cet été (I)

Le point de vue d'Henri Lefebvre sur les situationnistes

L’été surtout celui-ci, on a plus de temps pour faire un peu de rangement et on trouve derrière cette étagère ou s’est accumulé des vieux papiers, des vieux bouquins qu’on pensait avoir égarés.

Le premier extrait souligné en son temps témoigne d’un intérêt d’une autre époque. Il exprime le point de vue d’Henri Lefebvre sur ses anciens amis, les situationnistes. On le trouvera dans le livre Le temps des méprises publié en 1975 aux éditions Stock. Il s’agit d’un long entretien, d'une conservation et on y découvrira un H.Lefebvre étonnant...


« Je crois qu'il y a eu là une authentique avant-garde ; par la suite, le mouvementent situationniste est devenu à la fois efficace et dépérissant. La richesse du début de cette invention de situations s'est perdue et fixer ; ils sont devenus spécialistes de l'injure et aussi du mot d'ordre immédiatement efficace, par exemple les graffiti dans le genre : « Ne travaillez plus, jouissez. », C'était bien dans la ligne des débuts, mais, à mon avis, c'est appauvri par rapport à l'idée de l'invention, de la création de situations nouvelles, idée utopique mais pas tellement, puisque, effectivement, nous avons vécu ou créé une situation nouvelle, celle de l'effervescence dans l'amitié, celle de la micro-société subversive et révolutionnaire en plein cœur d'une société qui, d'ailleurs, l'ignorait. C'est uniquement là-dessus que je veux insister aujourd'hui. Les livres publiés par mes ex-amis ne manquent pas d'intérêt, mais celui de Vaneigem, Traité de savoir-vivre, fonde un nouvel élitisme soi-disant de gauche... L'élitisme ? Pourquoi pas ! Subversif ? Révolutionnaire ? Quelle ironie ! Comment ? Par quelles médiations ? L'élitisme uni à l'autogestion ! C'est du Stirner proudhonisé. Marx a dit de façon assez cocasse que les mouvements de gauche et les marxistes français échouaient toujours dans le stirnerianisme proudhonisé. Je sais que ce danger me guette. Je l'évite. Chez Vaneigem, il consiste en un mélange d'individualisme et d'autogestion conçus à la manière proudhonienne comme une autosuffisance à la base, en négligeant les problèmes globaux, et notamment les problèmes de l'État. Les livres de Vaneigem n'en sont pas moins intéressants. Quant au livre de Debord sur la « société du spectacle », il ne me paraît ni plus ni moins important que ceux de Mc-Luhan. Il caractérise la société contemporaine par un de ses traits sociologiques, c'est-à-dire la mise en images du spectacle. Le livre de Debord se présente comme une série de thèses. Ses petits copains et lui ont lancé des mots d'ordre antisociologiques avec lesquels je ne suis pas d'accord. Je n'aime pas tellement la sociologie en tant que science spécialisée et qui ne veut voir que sous l'angle de sa spécialisation les problèmes globaux, qui donc les occulte ; je trouve que tous les sociologues font du sociologisme. La Société du spectacle est un livre imprégné de sociologisme. Le politique, l'étatique n'y apparaissent pas. C'est encore une manière de rejeter dans l'ombre les problèmes de l'État. Je pense que ce mouvement situationniste s'est appauvri à partir de la confuse richesse des débuts. Il en est mort. Il n'empêche pas la vie quotidienne de rester un concept théorique et critique.

J'ai oublié de dire que mes ex-amis situationnistes s'étaient beaucoup agités à propos de cette revue Arguments, à la mort de laquelle j'avais d'ailleurs contribué. Dans une réunion, j'avais expliqué (Axelos, Duvignaud et Morin étaient là) que la revue Arguments avait fait son temps, qu'elle avait donné tout ce qu'elle pouvait donner ; alors mes amis situationnistes, encore mes amis, se sont agités et ont tenté une manœuvre qui consistait à remplacer Arguments par l'Internationale situationniste, leur revue.

Je montre l'ambiance ; c'est le côté détestable du parisianisme, de ces chapelles qui se livrent des combats, des luttes à mort. » p.160-161


dimanche 5 juillet 2015

Comme un chat de Floréal Cuadrado

Souvenirs turbulents d'un ANARCHISTE – faussaire à ses heures – vers la fin du vingtième siècle



La sincérité et la non complaisance de Floréal Cuadrado fait de ce livre un témoignage aussi fort qu'important. Dont la force pratique vaut bien plus et importe plus que toutes les digressions et logorrhées théorique. Ici et là on y apprend quelques vérités révélatrices d'un état d'esprit de certaines couches sociales face au réel "intense".

Passent à la moulinette critique: Les "partis combattants", l'avant-gardisme libertaire / élitaire, Guy Debord, Les déclarations d'Octavio Alberola, Les GARI, L'éthos de Jean-Marc Rouillan, l'impayable Lucio Urtubia. On y apprend par exemple que Cuadrado est à l'origine du faux Monde Diplo et de bien d'autres choses...Pas de grandes questions "idéologiques" mais de la "pratique" et de ses impasses.

L'objet ?

" Ce que je dis de moi ici n’a d’autre but que de montrer comment nous sommes passés du romantisme de la révolution radicale aux chimères de l’action “révolutionnaire” illégale sans poursuivre véritablement de but révolutionnaire ; comment nous sommes devenus, en quelque sorte, des politiciens de l’illégalisme " 

F. Cuadrado de-romantise salutairement sans briser ce qui fait le coeur des choses. Ainsi "Si l'histoire n'a retenu le nom que de quelques militants célèbre, sans les milliers d'anonymes, de sans gloire, le mouvement anarchiste espagnol n'aurait jamais connu un tel essor. Ce sont eux qui, avec une foi quasi religieuse, lui ont donné ses plus belles lettres de noblesse et sa singularité. Illettrés ou presque, ils ont bien souvent tout sacrifié pour las ideas, pour l'idéal. Sans ces militants, ma vie aurait été tout autre. Je n'aurais, de toute évidence, pas choisi la voie des combats incertains ou j'avais tout à perdre et peu à gagner. Leur rigueur morale et leur désintéressement m'ont préservé de bien des erreurs". (p.607)


Editions du Sandre. 680p. Avril 2015