lundi 19 septembre 2016

OREO de Fran Ross (Vient de re-paraitre en poche)

OREO de Fran Ross

"Une satire des relations entre la communauté noire américaine et la communauté juive, qui n’a rien perdu de son originalité ni de son insolence depuis sa première publication, en 1974. Née d’un père juif et d’une mère noire, qui divorcent lorsqu’elle n’a que deux ans, Oreo (qui tient son surnom des fameux biscuits « noir dehors, blanc dedans ») est élevée par ses grands-parents maternels à Philadelphie. À l’adolescence, elle décide de se rendre à New York, à la recherche de son père, pour élucider le secret de sa naissance. Mais sa découverte de la grande ville labyrinthique tourne vite à la quête picaresque… Parodie du mythe de Thésée, ce texte truculent est un questionnement sur l’origine, mais aussi sur l’utopie d’une réconciliation toujours en devenir. Figure ambiguë, métissée, Oreo, l’héroïne, fait montre d’une liberté de mouvement et de ton qui illustre le refus de toutes les frontières. Son identité métisse lui permet de déjouer toutes les structures, toutes les idéologies constituées.

Figure du voyage, de la traduction, de la médiation, elle incarne une identité multiple, pionnière d’une harmonie rêvée. Conte féministe qui s’attaque aux schémas masculins comme aux grands textes de la littérature occidentale, ce récit burlesque livre au lecteur une critique du discours blanc dominant aussi bien qu’une dénonciation des idéologies afrocentristes et du communautarisme. Satire des stéréotypes de la culture populaire, Oreo est un texte hybride, ludique et irrévérencieux, qui joue avec les notions d’ethnie et de genre, mais nous livre également une réflexion en acte sur le langage, tout à la fois sérieuse et totalement fantasque.

Extrait :

« Du côté juif de la famille, Christine hérita de cheveux frisés et d’une peau sombre et fine (elle est classée autour de 7 sur l’échelle des couleurs, et il ne faut pas la chatouiller). Du côté noir de la famille, elle a hérité de traits anguleux, du sens du rythme et d’une peau fine (il ne faut vraiment pas la chatouiller). Deux ans après la fin de cet ouvrage, elle serait l’idéale beauté dont parlent les légendes et le folklore – à vous de choisir la nationalité et de préciser le groupe ethnique. Quels que soient le visage et la silhouette que vos légendes et folklore font surgir dans votre esprit, mon petit chou, elle l’incarnera à la perfection. Christine n’était pas une enfant ordinaire. Elle était née coiffée d’une membrane que son premier et vigoureux hurlement déchira en huit. En plus de son talent précoce pour l’écriture spéculaire, elle tenait de sa mère l’amour des mots, de leur nuance et de leur cadence, de leur jus et de leur zeste, de leur variété et de leur précision, de leur cadencé et de leur torsion. Quand elle apprit à un âge encore tendre qu’elle aurait un jour à partir à la recherche de son père pour découvrir le secret de sa naissance, elle s’exclama : “Je m’en vais le retrouver, ce nique-ta-mère*.” À ses yeux, ce dernier mot était tout simplement le mot juste*. » 


Fran ROSS (1935-1985) est née à Philadelphie et a passé l’essentiel de sa vie à New York. Après des études de journalisme et de théâtre, elle a travaillé pour le Saturday Evening Post et collaboré à divers magazines. Elle a également écrit pour Richard Pryor, l’acteur et humoriste afro-américain le plus célèbre des années 1970. Oreo est son unique roman, devenu culte parmi les amateurs de littérature afro-américaine.

Post-Éditions 2014.

Postface d’Harryette Mullen 
Texte traduit de l’anglais (USA) par Séverine Weiss.

Vient de re-paraitre fin août 2016 
En poche chez 10 X 18.