La Propriété, c'est plus le vol - Elio Petri
La proprietà non è più un furto
Modeste employé de banque, pris de démangeaisons au simple contact de l’argent, Total vit chaque jour dans l’angoisse.
Convaincu des injustices causées par la richesse, il décide de s’attaquer au système, en prenant pour cible un boucher qui étale sa fortune avec ostentation.
Total démissionne pour se consacrer exclusivement à sa nouvelle tâche ! Il observe le comportement de sa future victime, puis passe à l’action …
"La propriété c’est plus le vol décrit une société — la société capitaliste — dans laquelle l’appropriation individuelle est
le trait dominant de la structure économique. Le propriétaire est
l’archétype de cette société et le voleur n’en est que l’homothétie.
Le voleur ni ne conteste ni ne cherche à détruire la propriété :
il cherche simplement à acquérir l’objet de ses désirs par des
voies différentes de celles des gens honnêtes. Le voleur participe
d’un même système que le propriétaire, tous deux sont engagés
dans la même course au profit, l’un par une voie légale — qui
n’exclue pas d’ailleurs le recours à des méthodes crapuleuses —,
l’autre par une voie illégale clairement acceptée comme telle.
Entre le propriétaire et le voleur, il n’existe pas de différence de
nature, tout au plus une différence de degré. Leur affrontement
n’est qu’apparemment inégal : ils contribuent tous deux à la survie
d’un système économique dont ils sont de sûrs piliers ; leur conservatisme
leur fait également haïr une transformation radicale qui
supprimerait la propriété et le vol. Paradoxalement, possédants
et larrons ont des intérêts communs, presque des privilèges de
classe à défendre : ils ne sont différents qu’au regard de la loi et
des organismes chargés de la faire respecter.
Pour défendre son bien, le propriétaire peut en effet compter
sur l’assistance des forces de l’ordre, la police et la justice (on
pourrait sans difficulté y inclure — bien que cela ne soit pas
directement indiqué dans le film — l’Eglise dont Petri souligne le
caractère conservatoire de toute société établie. L’argent cherche
à s’ennoblir en empruntant une sorte de rituel ecclésiastique : la
banque de La propriété c’est plus le vol ne ressemble-t-elle pas
à une église ?. La police traque les voleurs et en même temps
entretient avec eux des rapports de promiscuité. Le policier trouve
dans le « milieu » les indicateurs dont il a besoin pour accomplir
sa tâche. La police pénètre ce monde particulier qui est celui des
« hors-la-loi » mais en même temps se fait pénétrer par lui. Ici
l’ambiguïté devient totale et nous renvoie à une constante du film :
la mise en lumière de la collusion entre des intérêts apparemment
contradictoires mais qui agissent tous pour la survie d’un ordre qui
leur est profitable."
« La propriété ne peut rien donner d’autre que la maladie et les malades, elle ne peut qu’amblématiser toute la série des frustrations sexuelles et tenir l’homme prisonnier de celles-ci. Elle est la clef de cette espèce de ceinture de chasteté dans laquelle la société capitaliste a emprisonné l’homme ». Elio Petri.
Un film de Elio Petri avec Ugo Tognazzi - Flavio Bucci / Scénario Elio Petri - Ugo Pirro / 1974 - 126 minutes.
Film restauré en DVD chez Tamasa Diffusion